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Alba a publié une note il y a 12 ans
Bonsoir tout le monde,
Ce poème n’est pas de moi, mais je le trouve exquis surtout quand on le lit jusqu’à la fin
Sourire ….
Humblement AubeLe doigt de la femme.
Dieu prit sa plus molle argile
Et son plus pur kaolin,
Et fit un bijou fragile,
Mystérieux et câlin.Il fit le doigt de la femme,
Chef-d’oeuvre auguste et charmant,
Ce doigt fait pour toucher l’âme
Et montrer le firmament.Il mit dans ce doigt le reste
De la lueur qu’il venait
D’employer au front céleste
De l’heure où l’aurore naît.Il y mit l’ombre du voile,
Le tremblement du berceau,
Quelque chose de l’étoile,
Quelque chose de l’oiseau.Le Père qui nous engendre
Fit ce doigt mêlé d’azur,
Très fort pour qu’il restât tendre,
Très blanc pour qu’il restât pur,Et très doux, afin qu’en somme
Jamais le mal n’en sortît,
Et qu’il pût sembler à l’homme
Le doigt de Dieu, plus petit.Il en orna la main d’Eve,
Cette frêle et chaste main
Qui se pose comme un rêve
Sur le front du genre humain.Cette humble main ignorante,
Guide de l’homme incertain,
Qu’on voit trembler, transparente,
Sur la lampe du destin.Oh ! dans ton apothéose,
Femme, ange aux regards baissés,
La beauté, c’est peu de chose,
La grâce n’est pas assez ;Il faut aimer. Tout soupire,
L’onde, la fleur, l’alcyon ;
La grâce n’est qu’un sourire,
La beauté n’est qu’un rayon ;Dieu, qui veut qu’Eve se dresse
Sur notre rude chemin,
Fit pour l’amour la caresse,
Pour la caresse ta main.Dieu, lorsque ce doigt qu’on aime
Sur l’argile fut conquis,
S’applaudit, car le suprême
Est fier de créer l’exquis.Ayant fait ce doigt sublime,
Dieu dit aux anges : Voilà !
Puis s’endormit dans l’abîme ;
Le diable alors s’éveilla.Dans l’ombre où Dieu se repose,
Il vint, noir sur l’orient,
Et tout au bout du doigt rose
Mit un ongle en souriant.Victor Hugo.
Faut quand même bien reconnaître que c’est quelque chose , notre vieux Victor !
Chapeau bas à l’artiste !
Très beau poème, qui correspond si bien à une soumise …
Tout le génie de VH, qui en ce XIX ème au puritanisme exacerbé a poussé son écriture au plus proche du sublime et au suggestif, qui est un composant essentiel de son génie, rarement loué.(je parle du suggestif!!!)
Merci Aube, notre site est un bel écrin pour de tels écrits.
Merci Aube de citer notre grand VH, qui au cœur d’un XIX ème siècle au puritanisme exacerbé, a su par son génie transgresser, par la magie des mots et de son art, les tabous de son temps. En ce doigt, toute la Femme nous apparait et notre cérébralité est en éveil.
Ce site est le plus beau et naturel des écrins pour de tels écrits !