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Tous ceux qui ont un peu pratiqué nos relations connaissent cet état étrange dans lequel se trouvent certaines soumises lors de certains rapports particulièrement réussis entre un Maître et sa soumise.
Elles sont réellement « ailleurs » et perdent parfois toutes les notions constitutives de leur personnalité propre !… D’ailleurs, elle ne se reconnaissent plus elles même !
Celle qui se croyait pudique devient exhibitionniste, celle qui se croyait douillette réclame le fouet, celle qui se pensait réservée devient lubrique, bref, leur comportement change radicalement, mais aussi, d’autres modifications s’opèrent : Leurs sensations sont pour le moins altérées, et bien souvent magnifiées. Elle ne savent plus sincèrement si tel acte relève de la douceur ou de la brutalité, si telle sensation relève du plaisir ou de la douleur. Elles n’actionnent plus les « safe words » de tous ordres simplement parce que cela n’a plus aucune signification dans le contexte de ce qu’elles vivent dans le moment présent. Elles peuvent devenir brutalement très amoureuse de leur Maître sans aucune considération pratique concernant celui qui les domine.
Un état second bizarre se prolongera plusieurs jours après, même en l’absence du Maître. La soumise reste sur son petit nuage.
Par la suite, ce moment, en particulier, la toute première fois où elle atteint cet état, restera à jamais gravé dans sa mémoire.
Pour ma part, j’ai d’abord cherché une cause d’ordre psychologique à ce phénomène. Je pensais que mes actes étaient très conformes aux images mentales de leur monde fantasmatique, et que c’est cette similarité qui créait ce trouble. En quelques sortes, elles se trouvent projetées dans leurs propres rêves, et c’est tellement troublant qu’elles éprouvent des difficultés à faire le tri entre rêve et réalité… Et comme leurs fantasmes leur sont naturellement très familiers, elles ont l’impression d’être dans leur propre monde et de savoir à l’avance tout ce qui va s’y passer.
Cette ambiance de trouble onirique, le fait qu’elles aient peur d’une situation nouvelle, mais qu’elles soient rassurées parce qu’elle évoluent dans leur propre monde expliquerait cet état bizarre.
La répétition de témoignages concordants a, semble-t-il, incité des chercheurs américains à se pencher sur des causes plus physiques et plus techniques à cet état et ils auraient trouvé des causes tout à fait singulières, dues à des sécrétions extrêmes d’hormones diverses.
Je n’ai pas trouvé le compte rendu scientifique de ces études, mais juste la traduction de commentaires de quelqu’un qui y aurait participé.
.« Nous avons baptisé « Subspace » un état très particulier atteint par des soumises lors de relations de domination soumission en interaction avec leurs Maîtres.
Cet état se caractérise par une sécrétion particulièrement remarquable d’endorphines, et par des modifications du comportement du soumises. Ces sécrétions ne sont pas systématiquement identiques en quantité pour chaque expérience, mais sont en moyenne beaucoup plus importantes que dans n’importe quelle autre activité y compris les activités sexuelles traditionnelles.
Il semblerait qu’il existe une phase initiale correspondante à la première relation réussie avec un Maître, qui amène le premier « subspace », et qui pourrait provoquer une sorte de sensation de « manque », comparable aux phénomènes observés lors de l’usage de certaines drogues.
Cet état est caractérisé par les soumises en termes de « moments merveilleux » de « sensation de flotter dans les airs », de « noyade heureuse » ou de « état de bonheur parfait ».
Pratiquement, il s’agit d’un état de conscience modifiée pendant lequel la soumise se montre particulièrement douce, affectueuse et tendre. Elle est capable de s’abandonner totalement à son Maître, et perd toute notion de danger potentiel.
La soumise, à ce moment peut perdre également ses moyens de communication, même au point de ne plus pouvoir parler.
Dans cet état, toute action du Maître, qu’elle soit sexuelle ou non, qu’il s’agisse de douleur infligée ou non, est alors analysée par le cerveau de la soumise en termes de plaisir positif, et accroît encore les décharges d’endorphines.
La nuit suivante, on constate souvent un sommeil anormalement profond. Et dans la journée suivante, une sorte d’hébétude.
Ce n’est qu’après une assez longue période de retour au calme que la soumise récupère son état normal. elle peut occulter pendant une certaine durée (24-48h) le souvenir de son passage dans le « subspace », mais en gardera ensuite un souvenir extrêmement positif et ce, pour une durée indéterminée. »
Si quelqu’un parmi vous a des éléments plus précis,je pense que nous serions nombreux à être très interessés.
Cependant, même à l’issue de cette intéressante étude, la question fondamentale reste posée : Pourquoi la soumise, mise dans ces conditions, secrète tant d’hormones ??? Ce qui en fait revient à la question d’origine…Voici ce que dit Khayyam Alamut, un Maître très expérimenté, sur ce sujet :
Subspace… le terme est allégorique, qui décrit ce moment où la soumise se sent plus dévouée et obéissante que jamais comme un véritable monde parallèle, un espace-temps où les réalités sont altérées, une dimension où les pensées sont biaisées, où l’obéissance règne, où seuls comptent les mots et actes du dominant. Mais si tant de personnes ont reconnu leurs propres sensations dans ce terme au demeurant pompeux, ce n’est certainement pas par hasard : comment définir la jouissance, particulièrement lorsqu’elle est si personnelle, si cérébrale, si difficile à communiquer ?
Le mot est froid, pour refléter de si chauds sentiments, et d’aucuns argumenteront sans fin sur le fait que son interprétation en est toujours personnelle, variable selon les individus…
Pour définir cet état langoureux dans lequel on se sent baigner, lorsque l’on fait l’amour et que les corps se rencontrent en parfaite communion, les deux esprits immergés entièrement dans l’acte lui-même, ce moment où plus rien ne compte sinon les frissons que l’on éprouve et ceux que l’on procure, cette longue jouissance, source de tous nos désirs, parfois plus précieuse que l’orgasme lui-même, on parle de volupté… le ressenti de la volupté est différent pour chacun, mais tout le monde s’accorde à trouver dans ce mot l’évocation d’une sensation comprise et partagée…
Le subspace, c’est la volupté dans la soumission. Et comme les loisirs du bondage ne ressemblent pas toujours aux jeux du sexe, il est bien des façons d’atteindre ou d’effleurer ce sentiment magique et effrayant, s’y retrouver intégralement plongé ou venir le taquiner, s’y brûler un petit peu les ailes pour s’en éloigner et y revenir…
Une soumise qui n’a encore jamais été dominée pourra ressentir la piquante chaleur du subspace envahir son corps en s’entendant simplement édicter des consignes pour la première fois. Une personne ayant de forts instincts masochistes pourra ne commencer à l’entrevoir qu’au trentième coup de fouet sur sa peau, fermement maintenue dans des liens qui l’écartèlent. Ensuite, pour l’une et pour l’autre, il pourra y avoir des variations d’intensité ; celle-ci parlera de subspace en songeant à cet instant purement cérébral où elle a senti sa conscience perdre équilibre, celle-là sacralisera le terme et ne l’emploiera que pour évoquer des souvenirs où elle s’y est jugée intégralement plongée. Toutes deux disserteront pourtant bien d’un même phénomène.
Le subspace, ce n’est pas l’orgasme, mais la jouissance de la soumise ; ce moment où les pensées commencent à basculer, s’altérer, où la soumission semble ne plus supporter d’alternative, où quoi que l’on puisse dire ou faire, c’est sur un sentier tracé par l’autre qu’on le fait. Être en n’importe quel endroit de ce sentier vaporeux, c’est être dans le subspace.
Y être allé une fois signifie vouloir y retourner. La route qui y mène n’est pas simple, mais, comme en hypnose, on en retrouve plus facilement la voie après quelques visites. Ensuite… on souhaite y rester le plus longtemps possible, progresser sur le chemin, et là, c’est au dominant de veiller à protéger sa partenaire d’elle-même, l’empêcher d’avancer trop vite, tempérer son approche pour faire en sorte que lui et elle ne manquent rien du paysage sur cette route qui peut être aussi magnifique que destructrice.
En BDSM, on parle couramment d’échange de pouvoir, d’accord consensuel de perte de liberté pour celle qui se soumet. Passer le pouvoir, laisser toutes les décisions à l’autre, demeurer soi-même tout en se sentant à la permanente merci de celui qui domine, ne plus rien oser faire qui lui déplaise, éprouver tout le poids de sa propre impuissance, c’est ce que recherchent beaucoup de soumises, sinon toutes. Au moins en fantasmes. Mais dans ce type de relations, le rêve peut devenir réalité au moment où l’on s’y attend le moins… une directive qui semble tomber au hasard ; précisément celle qu’on n’aurait pas voulu entendre, peut-être au mauvais endroit, au mauvais moment… que faire alors ?
Mille choses peuvent passer en tête, lorsqu’on reçoit un ordre. La plupart du temps, à moins d’être déjà en plein subspace, on commence par le juger. « fermer mes yeux ? Tout de suite ? Ici, dans ce wagon de métro ? Il ne se rend pas compte. Les gens vont me regarder, ils vont penser que je suis folle… et puis, si quelqu’un monte, que je connais… et s… »
Que l’ordre soit répété, fermement confirmé, qu’un simple regard du dominant passe pour dire : « j’y tiens. Tout de suite », et la soumise, en fermant ses yeux, ne pourra trouver qu’une réponse, une seule, à toutes ses questions – celle-là même qui scellera sur l’instant le passage de pouvoir, et sa descente en subspace : « Il l’aura voulu… Je lui fais confiance… il me protégera. Je ne suis pas seule. »
Mille choses peuvent passer en tête, lorsqu’on vient de se faire punir, fouetter, fesser… La punition, c’est un peu le « j’y tiens » du dominant ci-dessus, la preuve que oui, il désire voir sa partenaire vraiment obéissante. Pour celle-ci, ce peut-être un passe-droit, une sorte de mandat que lui donne son maître ; « les choses que tu vas faire, c’est moi qui te les fais faire. Ce n’est pas toi – ne te juge pas, n’analyse pas, obéis, simplement ».
La punition, c’est aussi, immanquablement, une motivation de plus pour obéir, une référence qui va aider la soumise à rapidement trouver réponse à ses questions intérieures, des réponses totalement biaisées, dans un jeu aux règles absolument injustes, qui de fait, la conduiront à ne plus pouvoir penser objectivement, et ne lui laisseront d’autre choix que l’obéissance. Ce moment où elle en viendra potentiellement à oublier que la situation est consensuelle, que son partenaire l’aime, que c’est de son plein gré qu’elle lui a conféré une si large autorité sur son corps et son âme, cet instant où, perdant le souvenir du contexte, elle va presque se surprendre à le craindre et où elle sera prête à tout pour le satisfaire et éviter une nouvelle sanction scellera son entrée immédiate dans le subspace, pour un moment qui durera peut-être aussi longtemps que le jeu lui-même.
Mille choses peuvent traverser l’esprit d’une personne entravée. L’une d’elle est : « puis-je me détacher seule ? » Si la réponse est non, alors le passage de pouvoir a eu lieu. Le passage de pouvoirs… pas l’entrée en subspace. Tant que les pensées sont claires, aussi longtemps que l’on ne ressent pas le poids réel de cet échange qui vient de se produire, on peut attendre calmement, attachée, mais sereine. On se dit : « si je lui demande de me libérer, il le fera. »
Puis le temps passe, et les pensées changent… « si je lui demande de me libérer, le fera-t-il ? », et ce genre d’interrogation en amène d’autres, en cascade. Une douce panique intérieure peut s’installer, où la soumise se surprend à répondre elle-même à ses propres questions… Une envie de boire, l’anticipation d’un besoin pressant, un bête nez qui gratouille… elle préfèrera ne pas demander, de peur de s’entendre opposer un refus qui ne lui confirmerait que trop son impuissance, en illustrant à quel point elle repose désormais sur des décisions qui ne sont pas siennes. Là, dans cette lutte intérieure, tout peut arriver… « Dans cette position, ma circulation sanguine va sûrement finir par se couper, il devra bientôt me libérer de toute façon »… Que les nœuds soient bien faits, que la circulation du sang reste fluide, et c’est cette simple pensée, dix minutes plus tard, « la circulation ne se coupe pas… aucun prétexte à me faire libérer… » qui va trahir la soumise et la conduire tout droit en subspace, sans que le dominant n’ait eu à piper mot : le désarroi face à des liens trop fermes… et trop cruellement confortables.
Une chose passe en tête, une seule, lorsqu’on est attachée et que le dominant décide de vous chatouiller : s’en sortir, par tous les moyens possibles. C’est un jeu très, très dangereux – physiquement pour la victime, qui sur l’instant sera prête à s’arracher le bras pour se libérer, et moralement pour le couple, car les insultes et menaces risquent de pleuvoir. C’est peut-être une des manières les plus cruelles et les plus sûres de faire parvenir une personne au subspace, qui illustre parfaitement l’ambiguïté de cette dimension parallèle insolite où règne l’obéissance. Le subspace n’est pas atteint durant les chatouilles, il l’est ensuite. Si aucun safeword n’a été prononcé, si le dominant a su résister aux éventuelles injures et ultimatums, si la soumise est toujours aussi attachée, désormais pleinement consciente de son impuissance et du pouvoir qu’il détient sur elle, alors… en cet étrange moment, celle-ci se sentira plus que jamais disposée à tout pour éviter que le supplice ne recommence.
Quoi que l’on puisse en dire, le subspace est une zone dangereuse… qui peut malheureusement être atteinte par une soumise dans les mains mêmes d’un dominant inconnu. Le fait est, la domination aveugle parfois plus encore que l’amour.
L’un des ingrédients essentiels à la réussite d’une relation, c’est la confiance. La connaissance de l’autre s’acquiert avec le temps, et ne pourra, normalement, jamais être telle qu’une personne puisse entièrement et aveuglément s’abandonner à son partenaire, ce qui est heureux. Or, certains états d’exaltation, comme l’euphorie voluptueuse du subspace, ont la triste faculté de permettre à celle qui s’y plonge de dangereusement outrepasser ses limites. Au point de la conduire, par exemple, à faire taire ses instincts de conservation les plus élémentaires, pourtant si précieux dans un moment où l’atmosphère générale est à la jubilation plus qu’à la prudence, et où les risques de dérapage sont, eux, plus présents que jamais.
S’il est une vertu nécessaire à tout aspirant dominant, c’est bien la capacité de garder la tête froide. Sans nécessairement l’identifier, on ressent parfaitement l’entrée en subspace de la soumise, de l’autre côté de la badine. Ce n’est surtout pas un crédit pour faire n’importe quoi. S’il est un merveilleux cadeau dans l’abandon total qu’il représente, cet instant n’en est pas moins celui où la compagne a le plus besoin de soutien, de guidance… en même temps qu’envie de fermeté.
Il est parfois difficile pour un dominant d’accepter le fait que noyée dans le subspace, sa complice est bien. On la verra d’ailleurs s’y comporter occasionnellement comme si elle ne savait plus rien faire qu’obéir (ce qui risque, au passage, de laisser le partenaire hésitant, dans l’appréhension de sentir le jeu lui échapper soudain), et par certains signes, la personne en plein subspace va quelquefois donner à entendre son désir d’aller plus en avant sur la voie de la soumission, poussant littéralement le dominant à durcir l’action, à explorer des territoires jamais abordés…
Retenir, tempérer les ardeurs de la soumise, qui ne comprend probablement pas elle-même ce qui lui arrive, n’est pas toujours tâche aisée… d’autant moins que le dominant goûte souvent lui-même à l’extase du subspace. Dans de telles conditions, ne pas céder aux demandes instamment sexuelles que lui présente sa compagne peut se révéler une réelle gageure. Ces instants où tout peut basculer sont de véritables jouissances, à savourer comme il se doit par les deux parties… avec la plus grande prudence, et en admettant, peut-être, que ce point marque le seuil du trop loin – la limite à ne pas franchir.
À défaut de briser la personne elle-même, le dominant qui négligerait ses responsabilités pourrait très bien détruire la soumise en elle, s’il ne sait pas la protéger d’elle-même. Combien de dominateurs ont voulu trop en faire pour montrer leur talent, ou ont simplement trop écouté les envies de leur partenaire au point d’en oublier leur rôle de protecteur, combien de soumises se sont retrouvées face au constat qu’elles en avaient beaucoup trop fait, trop vite, et qu’elles devraient reprendre la route du début, en pensant, cette fois, à regarder le paysage sur leur passage et à en apprécier enfin les détails ?
Le subspace n’est pas le point G de la soumise, le but à atteindre à tout prix. La confiance, l’écoute, la discussion et la connaissance de l’autre sont les vrais points à rechercher dans ce type de relation, et c’est d’eux que naîtra, parmi mille autres plaisirs, ce doux sentiment d’abandon que l’on appelle subspace. Vouloir trop vite y parvenir, c’est brûler une complicité naissante et se gâcher la jouissance d’un parcours à accomplir ensemble. Chercher à le maintenir trop longtemps, avec tout ce qu’il comporte de dangereux, c’est épuiser les deux partenaires, les vider de toute leur énergie… car le subspace en est grand consommateur, pour la soumise comme pour le dominateur.
Pour moi qui vient de m’inscrire et étant totalement débutant, je trouve ce texte magnifique, plein de féérie et en plus il me donne envie d’essayer et surtout de réussir à vivre cette expérience du subspace !
Merci bien