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oxymore a adressé une note au groupe
Vos histoires, musiques et poèmes autour du Bdsm il y a 7 ans et 5 mois
NU INTEGRAL
Effet de mode : les gens se dénudent et s’exhibent. Le culte du corps règne. Il faut un teint halé et une peau douce et sans ride. Il faut des muscles et une silhouette mince. Il faut des gros seins mais pas trop de ventre. Il faut des beaux cheveux mais surtout pas de poils. Il faut se parfumer et neutraliser les odeurs naturelles. Il faut faire du sport et savoir apprécier les plaisirs de la chair. Il faut être dynamique et savoir rester zen. Dans ce monde de contradictions, sous l’influence despotique des médias qui dictent ses tendances, nous vivons, elle et moi, à notre rythme, hors du temps. Nous regardons peu la télévision et préférons suivre l’actualité qui nous entoure avec un peu de recul. Dans ce règne de l’éphémère, nous veillons à garder nos repères et à ne pas oublier nos rêves.
Nous sommes dans l’air du temps mais nous cultivons, sans honte, nos particularités. Nous aimons la gourmandise. Nous aimons les parfums naturels. Nous aimons les peaux douces et épilées qui ne voient pas le soleil. Nous aimons aussi les toisons pubiennes fournies. Nous aimons prendre soin de nos corps. Nous aimons partager l’érotisme de ces moments d’intimité.
Ce soir, comme tous les quinze jours environ, j’ai droit à une séance d’épilation : aisselles, jambes, fesses et plis de l’aine. J’appréhende toujours le programme, long et douloureux, dont je sors épuisé. Pourtant, je m’y soumets avec envie car Véronique met toute l’attention et l’amour nécessaires.
Pendant qu’elle fait chauffer la cire au micro-ondes, je m’allonge, nu, sur le plan de travail de la cuisine, prêt à endurer mon supplice. La sensation de chaleur est intense ; douce comme une caresse, elle se diffuse rapidement dans tout le corps. Le pire est à venir. Elle arrache la première bande de poils. Je ne m’y attendais pas. La petite douleur, en se répétant, s’intensifie. Elle remonte peu à peu en dénudant mes jambes… Quand elle s’occupe des zones les plus sensibles – à l’intérieur des cuisses ou entre les fesses-, je dois reprendre mon souffle de plus en plus longuement, entre deux attaques, pour avoir moins mal. J’essaie de maitriser l’anxiété et de me contrôler pour me détendre ; difficile. Rebels, les poils poussent parfois dans tous les sens et elle doit s’y reprendre à plusieurs reprises pour les éliminer intégralement. Cela devient insupportable. Je serre les dents, je me cabre, je me tends, je crie… Je suis douillet. Elle aime ça.
Et puis c’est fini. Je me laisse aller, les yeux mi-clos, à un grand relâchement. Epuisé, je suis à sa merci. Après le pire, le meilleur… Ma femme aime s’occuper de moi comme d’une poupée bien sage. Une poupée qu’elle câline après l’avoir torturée… Pour apaiser mes souffrances, elle commence par passer un gant bouillant sur ma peau. Sa chaleur bienfaitrice pénètre par tous les pores. Je suis bien. Elle me caresse de la douceur bienveillante de son regard. Elle rince avec une solution désinfectante pour éviter les irritations, puis elle sèche délicatement ma peau imberbe et fragile. Ce jour-là, elle ne griffe pas ; elle ne mord pas ; elle ne fouette pas. Elle n’est que douceur. Avec son éventail en plume d’oie, elle finit toujours, à force de doux va-et-vient, à me ranimer. Et alors, elle me couvre de baisers de la tête aux pieds. Je suis un sucre d’orge, une sucette à l’anis qui finit toujours par fondre dans sa bouche.